
La place Félix Faure, à Lillebonne, retrouvera prochainement ses fonctionnalités premières. Et certains des automobilistes qui s’y stationneront ignoreront que leur véhicule prend place sur plus de 2000 ans d’histoire. Un patrimoine qui a été récemment mise à nu à l’occasion d’une importante campagne de fouilles programmée cet été par Caux Seine agglo dans le cadre de son vaste projet Juliobona, LA cité antique sur la Seine. Ce chantier avait valeur de test. « Il était extrêmement déterminant dans l’évaluation du potentiel archéologique du site. Les découvertes que nous ferions ou non et leur qualité conditionnaient la poursuite d’un programme de fouilles sur plusieurs années pour faire avancer la recherche scientifique », explique Jérôme Spiesser, chargé d’études en archéologie de Caux Seine agglo et coordinateur du chantier.
Un chantier au-delà de toutes les espérances
Les résultats obtenus ont été au-delà des espérances des archéologues professionnels et de l’équipe de bénévoles qui les ont aidés dans cette traque du passé. « Nous avons trouvé des vestiges romains – probablement d’un habitat – datés du 1er siècle après J.C. Jamais nous n’avions encore déniché d’indices d’un passé aussi lointain de Juliobona. Ces vestiges content les tout débuts de la cité des Calètes », s’enthousiasme le pilote des fouilles.
Autre richesse mise à ciel ouvert : un mur d’un mètre de large et de 1, 80 mètres de hauteur et de ses contreforts, qui confirme l’existence d’un édifice public romain sous la place Félix Faure. Il s’agit d’une pièce remarquable, d’abord par sa rareté. « Dans le contenu scientifique à disposition en France et en Europe sur le patrimoine romain, jamais n’a été confirmée la présence d’un édifice public adossé à un théâtre romain », indique Jérôme Spiesser. Ce mur est admirable aussi pour son état de conservation. « Les archéologues se réjouissent d’ordinaire quand ils sont en présence d’une élévation de 10 ou 20 cm. Ils s’estiment alors chanceux ! », sourit le spécialiste.
Sur le chantier de Lillebonne, professionnels et bénévoles ont eu le bonheur de pouvoir mettre à jour ce vestige jusqu’à sa base. Les recherches à venir vont permettre d’identifier avec précision sa nature. « Cet édifice public romain date de la fin du 1er siècle / début du 2e siècle après JC. L’hypothèse que nous devons confirmer est qu’il pourrait s’agir d’un mur soutenant une terrasse artificielle qui aurait servi à la surélévation du sol à l’arrière du théâtre. »
Écailles et ossements de poissons mis à jour
Des traces de structuration d’un potentiel habitat datant des 2e et 3e siècles après J.C ont également été mis à jour : puis, canalisations, petit mur avec sol maçonné. « Mais ces vestiges sont très morcelés, reniés par des fosses d’époques ultérieures. Et certaines sont rougies, portant les stigmates d’un incendie. »
Dans la plus ancienne canalisation, les archéologues et bénévoles ont tamisé les sédiments dans les derniers jours de fouilles et ont « exhumé » écailles et ossements de poissons romains ainsi que deux jetons de jeux romains en os. « C’est encore de l’ordre de l’extraordinaire. Jamais encore nous n’avons retrouvé des ossements de poissons antiques », jubile le chargé de mission en archéologie.
À la date du 30 juillet, les fouilles s’achevaient, les trous étaient de nouveau comblés pour accueillir un nouvel enrobé afin de rendre à la place Félix Faure son usage habituel, à la date du 13 août.
Un travail de l’ombre s’élançait alors : l’écriture du rapport de fouilles qui doit pouvoir être confié à la fin 2021 à la DRAC (Direction des Affaires régionales) et à l’Etat. Ce rapport est déterminant : il va conditionner la poursuite du programme de fouilles sur trois ans souhaité par Caux Seine agglo, la ville de Lillebonne et le Département de Seine-Maritime sur la place Félix Faure et la rue Victor Hugo toujours pour faire avancer la recherche scientifique sur le patrimoine gallo-romain de la ville.
Retrouvez l’intégralité de l’article sur les fouilles archéologiques dans le prochain journal intercommunal Quinzo du jeudi 2 septembre, dans les commerces et sites distants de Caux Seine agglo.
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